Esprit chrétien
Nous voulons faire baptiser notre dernier. Comme pour nos autres enfants, nous avons fait ce choix; d’abord par tradition familiale, parce que cela fait partie de leur héritage. Par foi aussi, n’en déplaise à certains. Nous sommes croyants, bien que nous ne pratiquions pas, et nous avons souhaité que nos enfants appartiennent à la grande famille chrétienne. Les filles ont été baptisées sans difficulté aucune : l’une le jour de notre mariage, par le même prêtre, un homme d’une grande générosité d’esprit. Il l’a fait en toute simplicité, comme il a accepté sans même l’ombre d’une question, d’un reproche ou même d’une allusion, de nous marier, deux ans après notre union civile – et sans formation préalable! De même, le prêtre qui a baptisé notre deuxième, n’a rien exigé de notre part, ni préparation, ni certificat, ni même quelque assurance de notre foi. Il était heureux d’accueillir une enfant de plus dans la famille. Et je me souviendrai toute ma vie de la lettre qu’il a lue (et que j’ai conservé précieusement) pour souhaiter la bienvenue à Yaya. J’en ai encore les larmes aux yeux. Pourtant, ce n’était pas notre paroisse…
Nous pensions naïvement qu’il en irait aussi simplement pour notre petit dernier. Or, il a six ans et il n’est toujours pas baptisé. Je ne vais pas vous dire que nous n’y sommes pour rien. Oh non! Disons que ce ne fut pas une priorité sur la liste des impératifs qui ont suivi notre déménagement dans cette ville – et des tristes événements familiaux qui ont suivi. D’éloignements géographiques incompatibles aussi. Juste quelques embûches sur le chemin.
Mimi et Tintin dans la chapelle de Chenonceau, l'été dernier. L'occasion d'une petite leçon... sous ce tableau de Murillo, St-Antoine de Padoue et Jésus enfant. Il y a des lieux plus inspirants que d'autres...
Lorsque nous avons entrepris des démarches – Tintin avait alors trois ans, je l’ai fait auprès de la seule église où je me rends occasionnellement : la cathédrale. Or, on m’a gentiment refoulée vers ma paroisse… Ma foi doit avoir ses limites, car ladite paroisse est une monstruosité architecturale et j’avoue, et je n’y ai jamais mis les pieds… (ou peut-être pressentais-je que je n’y serai pas la bienvenue?)
Sachant que nous irions inévitablement visiter la belle-famille un jour, nous avons reporté le projet. J’avais demandé à mon mari de s’occuper des démarches pour le baptiser en Argentine, pensant que ce serait plus simple qu’au Canada – mais le prêtre qui a nous marié a été muté dans le Nord et les parrain et marraine n’étant pas de là-bas, mon mari a préféré entreprendre les démarches ici. Il s’est fait bien recevoir! « Notre » curé lui a indiqué qu’étant donné qu’il ne nous avait jamais vus en 5 ans, il était hors de question qu’il baptise notre fils! Et vlan… (m’est avis que la laideur de son église a délavé sur son âme! Ouh la vilaine…)
Du coup, changements de plans précipités par l’imminence du départ pour l’Argentine, nous voilà à communiquer avec la paroisse de ma belle-mère… laquelle exige certificats de préparation pour nous, pour chacun des parrain et marraine! Rha… la marraine est à Paris, et comme moi, ne pratique pas, bien qu’elle soit croyante. Difficile dans ces conditions d’obtenir un certificat rapidos, d’autant plus qu’elle a d’autres priorités. Je ne vais pas lui imposer une formation avec tout ce qu’elle vit. Ce ne serait pas chrétien. De toute façon, elle ne pourra pas être présente. Le parrain est ici. Lui a entrepris des démarches. Un vrai parcours du combattant, trois églises qu’il visite, et personne pour lui offrir un petit rafraichissement sur le rôle du parrain dans les temps! Quant à nous… et bien le curé de notre paroisse est tellement sympa qu’on n’ira sûrement pas le relancer! Et après on s’étonne que les églises se vident…
Alors, oui, on va nous dire, bien fait pour vous, vous n’aviez qu’à pratiquer et être cohérents. C’est vrai… et c’est faux aussi. Je pratique à ma façon. Je prie. Dans la nature, ou à d’autres moments. Il m’arrive de rentrer dans une église, d’être touchée par l’Esprit, d’assister parfois à une messe chantée. Mais cela reste exceptionnel, pas ma tasse de thé de prier sur commande à intervalle régulier et suivant la recette, j’avoue mes limites (et admire et respecte ceux qui le font!). J’essaye d’inculquer un minimum de culture religieuse à mes enfants et surtout de mettre en pratique certains principes de base. On en discute, les filles ont fait leur catéchèse mais n’ont pas voulu poursuivre, tant les cours étaient bêbêtes (dixit les concernées, moi je n’y ai pas assisté!). Je leur laisse le droit au libre choix. Elles n’ont pas voulu faire leur communion. Nous n’avons pas insisté, la foi ne se commande pas. Nous nous situons donc délibérément dans la marge… Pas cohérents du tout. Des mêlés : ni incroyants, ni pratiquants, des métis quoi. Mais je me trompe sûrement. Les voies du Seigneur sont uniques et passent par l’Église, c’est bien connu.
Alors pourquoi le baptiser, hein? On veut qu’il soit touché par l’esprit sain. J’y tiens. D’autant plus que de nos trois enfants, c’est celui qui s’intéresse le plus aux églises, à Dieu, à l’au-delà. Mais bon… je crois qu’il faudra se résigner à attendre le bon moment, la bonne rencontre, celui qui verra l’intention sans se formaliser de la façon.
J’ai hésité avant de poster ce billet. Je vous demande à l’avance de m’excuser si je heurte certaines sensibilités… Je ne critique aucune foi, ni pratique (ni l’athéisme d’ailleurs), juste la façon dont on complique tout, sous prétexte de quoi? J’ai beau chercher, je ne vois pas en quoi un bout de papier change quelque chose à l’affaire. Surtout, je ne comprends vraiment pas pourquoi on pénalise une personne en mettant en doute sa famille et le choix de ses parents. Et je suis très heureuse de lire que des prêtres, y compris le cardinal de Buenos Aires, pensent comme moi… Puissent-ils être entendus!