Festival Campanella
Depuis deux jours, à défaut de suivre les Jeux à la télé que nous n'avons pas, nous nous régalons des derniers dvd reçus par la poste. Ma belle-soeur nous a fait parvenir toute la filmographie de Juan José Campanella, un réalisateur argentin dont nous ne connaissions pas encore l'oeuvre. Et depuis deux jours, on se couche tard!
Je ne peux que vous encourager vivement à aller voir au moins son dernier film, El secreto de sus ojos.
Benjamin Esposito, joué par l'acteur Ricardo Darin (vedette de tous les films de Campanella) vient de prendre sa retraite après une carrière à la Cour pénale. Il se décide à écrire un roman à partir d'une histoire qui l'a hanté pendant plus de 20 ans. Une histoire d'assassinat, de recherche et du jugement du coupable. Mais dans l'Argentine des années 74, qui entre sans retour dans une période mouvementée de haine et de violence, le crime, la justice, la politique, la vengeance sont autant de courants trop forts pour que les personnages puissent y échapper. Esposito n'écrit pas sans but même s'il lui en coûte de le reconnaitre. Il écrit pour une femme, Irene (Soledad Villemil, prix Goya 2010 Révélation féminine de l'année), dont il est secrètement amoureux depuis trop d'années. Une femme qui a partagé cette histoire. Cependant, les choses sont moins simples qu'elles n'ont en l'air. L'exercice de mémoire n'illumine pas seulement le passé. Il jette aussi une lumière desincarnée sur Esposito, et son exercice de mémoire, ses actions, ses décisions, ses erreurs irréparables. Les souvenirs ne forment pas une superficie lisse sur laquelle la vérité attendrait qu'on la cueille. Ce sont plutôt des chemins obscurs et sinueux. Et la vérité qui se cache derrière est beaucoup moins simple que ce que Esposito s'imaginait. Pourtant, il sait qu'il doit aller jusqu'au bout. Pour comprendre ce qui s'est passé, pour se comprendre lui-même et pour, une fois pour toute, confronter la femme de sa vie.
Si ce film passe près de chez vous, précipitez-vous! Les acteurs sont fabuleux, en particulier le second rôle Guillermo Francella. Les dilemnes entre amour et raison, entre vérité et justice, et vengeance et humanité suscitent réflexion sans pour autant que ce soit intellectualisé. Pour info, ce film a battu tous les records d'entrées en Argentine. Nommé dans plusieurs catégories aux Goya 2010, et nominé pour le meilleur film étranger aux Oscars. Campanella avait déjà été battu en 2001 pour ce titre sur un de ces films précédents, El hijo de la Novia, l'histoire d'un homme qui fait sa crise de mi-vie (à voir en v.o., ne serait-ce que pour les lieux, les personnages et les expressions, tellement porteño!)
Hier soir, nous avons aussi vu La luna de Avellaneda (2004), une histoire qui se déroule autour d'un club communautaire, et qui résume à elle seule la grande histoire de l'Argentine, dont on ne parle pourtant jamais dans ce film, mais qui demeure omniprésente. Très émouvant pour mon Argentin à moi, qui vient de là. Encore une fois, le jeu des acteurs est époustouflant.
Tous les films de Campanella ont en commun une qualité incomparable : il sait montrer à l'écran la complexité de l'être humain, ses sentiments, parfois contradictoires, les choix, les erreurs, les hésitations, les remises en question. Ses héros sont toujours à une croisée des chemins, s'enfoncent dans une histoire qui leur permettra de mieux se découvrir ou tout simplement de se connaître. Les personnages secondaires sont tout autant riches et attachants et interprétés avec brio par des acteurs de renom. Ce sont des films sensibles, à voir absolument pour ceux qui s'intéressent à l'être humain.... et à l'Argentine!
No se lo pierdan!